La convention n° 190 expose un plan commun pour faire du droit de chacun à un monde exempt de violence et de harcèlement une réalité pour tous. Les éléments qui sous-tendent ce cadre sont les suivants:
respecter, promouvoir et réaliser le droit de toute personne à un monde du travail exempt de violence et de harcèlement en adoptant une approche inclusive, intégrée et tenant compte des considérations de genre (art. 4);
respecter, promouvoir et réaliser les principes et droits fondamentaux au travail et promouvoir le travail décent (art. 5);
garantir le droit à l’égalité et à la non-discrimination aux travailleurs et autres personnes appartenant à un ou plusieurs groupes vulnérables (art. 6).
Ces principes fondamentaux établissent un cadre fondé sur les droits en vue de prévenir et d’éliminer la violence et le harcèlement (voir figure 4).
Figure 4. Cadre fondé sur les droits pour ce qui concerne la prévention et l’élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail
Choisissez la section à lire en cliquant sur le bouton ci-dessous ou commencez à lire le chapitre entier
3.1. Le droit à un monde du travail exempt de violence et de harcèlement
La convention n° 190 est le premier instrument international qui reconnaît expressément le droit de toute personne à un monde du travail exempt de violence et de harcèlement (art. 4). La convention n° 190 et la recommandation n° 206 apportent un complément indispensable à d’autres instruments internationaux tels que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ainsi qu’aux normes internationales du travail relatives à l’égalité et à la non-discrimination, et à la SST, qui prévoient également la protection contre la violence et le harcèlement, mais de manière implicite 14.
Encadré 8. Le droit à un monde du travail exempt de violence et de harcèlement dans le droit du travail et les dispositions des conventions collectives
Ces dernières années, un nombre croissant de pays ont davantage mis l’accent sur le droit d’être à l’abri de la violence et du harcèlement dans leur législation relative au travail.
Andorre: l’article 44(2) (droits de la personne salariée) du Code du travail de 2018 énonce ce qui suit:
Dans l’exécution du contrat de travail, la personne salariée: […]
e) a le droit de ne pas subir de discrimination directe ou indirecte au moment de son recrutement, ou une fois recrutée, qui soit fondée sur sa naissance, sa race, son sexe, son orientation sexuelle, son origine, sa religion, son handicap, son opinion ou toute autre situation personnelle ou sociale, ou son affiliation, ou pas, à un syndicat ou à une organisation politique; […]
g) a droit au respect de sa vie privée et à la considération due à sa dignité, y compris la protection contre le harcèlement pour les raisons énoncées à l’alinéa e) ci-dessus.
Roumanie: le Code du travail, tel que modifié en 2020, énonce le droit de tout salarié à un emploi exempt d’actes de harcèlement moral (art. 5.3).
Iraq: aux termes de l’article 42 de la loi de 2015 sur le travail:
Le travailleur a les droits suivants: […]
bénéficier de l’égalité de chances et être recruté et travailler dans des conditions égales, sans aucune discrimination;
bénéficier d’un environnement de travail exempt de tout harcèlement.
Italie: la nouvelle convention collective pour le secteur maritime, signée le 16 décembre 2020, reconnaît le droit de tout marin «de travailler, de se former et de vivre dans un environnement exempt de harcèlement et d’intimidation motivé par le sexe, la race et tout autre motif» (Confitarma et al. 2020).
Sénégal: la convention collective nationale interprofessionnelle signée le 30 décembre 2019 ne mentionne pas expressément la convention n° 190. Toutefois, ses principaux éléments, dont le droit à un monde du travail exempt de violence et de harcèlement et la nécessité d’une approche inclusive, intégrée et tenant compte des considérations de genre, y figurent.
14 S’agissant de l’article 7 b) du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels n’a de cesse de souligner que des facteurs tels que le fait de travailler à l’abri de la violence et du harcèlement, y compris du harcèlement sexuel, sont essentiels pour garantir le droit à des conditions de travail justes et favorables. Voir également Chappell et Di Martino 2006; Lippel 2016.
3.2. Le rôle des principes et droits fondamentaux au travail dans la construction d’un monde du travail exempt de violence et de harcèlement
La convention n° 190 et la recommandation n° 206 reconnaissent que le droit d’être à l’abri de la violence et du harcèlement dans le monde du travail est indissociable de tous les principes et droits fondamentaux au travail, auxquels il est étroitement lié, et plus largement du travail décent. La violence et le harcèlement sont souvent la cause et la conséquence des déficits de travail décent, et vice versa, comme la recherche l’a montré (BIT 2016b; de Bruijn 2020; Cassino et Besen-Cassino 2019). Après avoir reconnu dans son préambule que la violence et le harcèlement dans le monde du travail sont incompatibles avec le travail décent, la convention n° 190 invite les États à respecter, à promouvoir et à réaliser les principes et droits fondamentaux au travail, ainsi qu’à promouvoir le travail décent, en vue de prévenir et d’éliminer la violence et le harcèlement (art. 5).
La liberté syndicale et la reconnaissance effective du droit de négociation collective sont des moyens essentiels pour prévenir et combattre les situations de violence et de harcèlement au travail. À l’inverse, le refus de ces droits est un facteur important de l’aggravation du risque de subir violence et harcèlement (BIT 2017) 15. Sur ce point, la recommandation n° 206 recommande que ces droits fondamentaux soient garantis à «tous les travailleurs et tous les employeurs, y compris ceux dans les secteurs d’activité, professions et modalités de travail davantage exposés à la violence et au harcèlement» (paragr. 3).
Encadré 9. Étendre le champ d’application de la liberté syndicale et du droit de négociation collective en tant que voie à suivre pour une protection efficace contre la violence et le harcèlement
Ces dernières années, des initiatives ont été prises à différents niveaux pour étendre ces droits fondamentaux à tous les travailleurs, quel que soit leur secteur d’activité ou leur nationalité (OIE 2019; Jesnes, Ilsøe et Hotvedt 2019). Il s’agit de mesures importantes, car elles ouvrent la voie à une protection plus efficace, y compris contre la violence et le harcèlement, par la voie de conventions collectives.
France: l’article 60 de la loi du 8 août 2016 a instauré une catégorie distincte de travailleurs indépendants recourant à une ou plusieurs plateformes de mise en relation par voie électronique. Ladite loi octroie à ces travailleurs le droit de constituer une organisation syndicale, d’y adhérer et de faire valoir leurs intérêts collectifs par son intermédiaire.
Samoa: l’article 3 de la loi de 2013 sur le travail et les relations professionnelles dispose ce qui suit: «La présente loi s’applique à: a) tout organisme public au regard de la loi de 2001 sur les organismes publics (résultats et responsabilité), qu’il figure ou non dans une loi; et b) toute entité commerciale privée ou non gouvernementale, y compris, sans s’y limiter, les entreprises liées au secteur agricole et aux pêcheries». Les articles 21 et 22 reconnaissent respectivement le droit de négociation collective et le droit à la liberté syndicale.
Initiatives des partenaires sociaux
Canada: l’organisation de travailleurs Justice for Foodora Couriers a été organisée par un groupe de livreurs à vélo de Foodora au Canada en vue d’améliorer les conditions de travail de leurs camarades livreurs de repas à vélo. Elle fait essentiellement campagne en faveur d’une rémunération juste pour un travail dangereux, d’un congé de maladie rémunéré et d’un lieu de travail respectueux, exempt de harcèlement et d’intimidation. Elle se prépare à s’affilier au Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes et, une fois que ce syndicat aura été certifié comme étant leur agent de négociation, Foodora sera légalement tenue de négocier avec ces livreurs en tant que groupe unique. Ceux-ci ont également commencé à nouer des relations à l’échelle internationale avec d’autres livreurs qui travaillent pour Foodora et d’autres plateformes, dans le but d’améliorer les conditions de travail des livreurs du monde entier (Eurofound 2021).
Italie: en 2018, à Bologne, comme suite aux négociations entre Riders Union Bologna, les syndicats italiens CGIL, CISL et UIL, la municipalité de Bologne et les plateformes Mymenu et Sgnam (puis Domino’s Pizza), la Charte des droits fondamentaux du travail numérique en milieu urbain a été signée. Cette charte se compose de quatre chapitres qui couvrent des dispositions générales, dont le droit de ne pas subir de discrimination, le droit d’être informé, le droit à la protection (dont le droit à un salaire juste, à la santé et à la sécurité, à la protection des données personnelles) et le droit à la déconnexion. Elle n’est pas contraignante et seuls ses signataires (volontaires) sont tenus de la respecter (municipalité de Bologne 2018).
Malawi: le Congrès des syndicats du Malawi s’emploie à établir des syndicats dans l’économie informelle. Le gouvernement du Malawi enregistre ces syndicats compte tenu du droit syndical et du droit de négociation collective (BIT 2019).
Le respect, la promotion et la réalisation du droit de chacun à un monde exempt de violence et de harcèlement ne peuvent être atteints que si le travail forcé ou obligatoire et le travail des enfants, y compris ses pires formes, qui sont intrinsèquement liés à la violence, sont éliminés. Ces dernières années, des jalons historiques ont été posés à ce sujet. En 2021, le protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, a atteint 50 ratifications. Il engage les gouvernements à prendre des mesures efficaces pour prévenir le travail forcé, protéger les victimes de travail forcé et garantir l’accès de celles-ci à la justice et aux moyens de recours et de réparation. En 2020, la convention (n° 182) de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants, 1999, est parvenue à la ratification universelle, ce qui confirme l’engagement mondial selon lequel les pires formes de travail des enfants, dont l’esclavage, l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et l’utilisation d’enfants dans des conflits armés ou d’autres travaux illicites ou dangereux qui compromettent la santé, la moralité ou le bien-être psychologique des enfants, n’ont pas de place dans notre société. Si la ratification en soi n’est pas suffisante et si la mise en œuvre est indispensable pour améliorer réellement la vie des personnes, ces réalisations inédites sont positives, marquent des avancées attendues depuis longtemps et représentent un pas vers la création d’un monde du travail exempt de violence et de harcèlement.
Le principe de l’égalité et de la non-discrimination est intrinsèquement lié à la violence et au harcèlement (BIT 2012; 2017; OIT CEACR 2019). Cela est évident non seulement du fait que la violence et le harcèlement fondés sur des motifs interdits doivent être considérés comme de la discrimination, mais également du fait que les lois et les pratiques discriminatoires peuvent contribuer à perpétuer des normes sociales préjudiciables ou des stéréotypes liés au genre susceptibles de conduire à la violence et au harcèlement (OIT 2019f). La recommandation n° 206 rappelle aux pays qui ont ratifié la convention que les efforts déployés pour protéger les femmes et d’autres groupes contre le risque élevé de violence et de harcèlement ne devraient pas avoir pour effet des formes de discrimination directe ou indirecte, notamment «de restreindre ni d’exclure l’activité des femmes et des groupes visés à l’article 6 de la convention dans des emplois, secteurs ou professions déterminés» (paragr. 12). Les recherches récentes montrent que la réforme des lois discriminatoires qui limitent la capacité des femmes à travailler, à administrer des biens ou à hériter de biens, par exemple, contribue à réduire la violence (Htun et Jensenius 2020). Une autre étude sur les cas de harcèlement sexuel des vingt dernières années montre que l’écart entre hommes et femmes sur le marché du travail se comble et que le harcèlement sexuel recule (Cassino et Besen-Cassino 2019) 16.
3.2.1. Garantir l’égalité et la non-discrimination pour les femmes et les groupes en situation vulnérable
La promotion de l’égalité au travail et la lutte contre la discrimination croisée et multiple sont des éléments clés de toute approche visant à prévenir et à faire cesser la violence et le harcèlement 17. À ce propos, l’article 6 de la convention n° 190 impose aux Membres «[d’]adopter une législation et des politiques garantissant le droit à l’égalité et à la non-discrimination dans l’emploi et la profession, notamment aux travailleuses, ainsi qu’aux travailleurs et autres personnes appartenant à un ou plusieurs groupes vulnérables ou groupes en situation de vulnérabilité qui sont touchés de manière disproportionnée par la violence et le harcèlement dans le monde du travail». La recherche montre que les caractéristiques personnelles telles que la race ou l’appartenance ethnique, le handicap, l’orientation sexuelle et l’identité de genre, le statut VIH/sida ou les responsabilités familiales peuvent exposer davantage les individus ou les groupes au risque de violence et de harcèlement (OIT CEACR 2019; OIT 2020d; 2020e).
Encadré 10. Garantir l’égalité et la non-discrimination pour tous
Sexe, genre et responsabilités familiales
Estonie: aux termes du paragraphe 21 de la Stratégie de prévention de la violence 2015-2020, la prévention de la violence est guidée par plusieurs principes, dont les éléments suivants: «La promotion de l’égalité de genre est une partie importantedelapréventiondelaviolence. En réduisant l’inégalité de genre, il est possible de prévenir la violence et de réduire le préjudice qui en découle. L’égalité de genre concerne tant les hommes que les femmes. Par conséquent, les mesures de prévention et de réduction de la violence doivent cibler les hommes et les femmes afin de modifier les préjugés et les comportements stéréotypés, ainsi que les rôles des femmes et des hommes à la maison, au travail, à l’école et dans la communauté.»
Japon: depuis le 1er juin 2020, en vertu de la loi sur la prévention du harcèlement sur le lieu de travail, les entreprises de plus de 50 salariés doivent mettre en place des mesures de prévention du harcèlement sexuel et du harcèlement lié à la grossesse, à la maternité et au congé parental. Les entreprises doivent également prendre des mesures pour sanctionner les harceleurs. En vertu de la loi sur le congé parental et le congé familial et de la loi sur l’égalité de chances, telles que modifiées, les entreprises doivent prendre des mesures pour empêcher que les supérieurs ou les collègues ne créent un environnement de travail hostile à la grossesse d’une employée, à la mise au monde d’un enfant ou à la prise du congé parental ou du congé d’aidant (Bibliothèque du Congrès 2020).
Handicap
Autriche: aux termes de l’article 7 d) de la loi sur l’emploi des personnes handicapées, telle que modifiée: «Il y a harcèlement si, en même temps qu’un handicap, une personne est soumise à un comportement non désiré, inapproprié ou répréhensible qui vise à porter atteinte à sa dignité ou porte atteinte à sa dignité et instaure un environnement intimidant, hostile, dégradant ou humiliant pour la personne concernée.»
Azerbaïdjan: en vertu de l’article 6(3) de la loi n° 1153-VQ de 2018 sur les droits des personnes handicapées, la discrimination fondée sur le handicap est définie comme «toute distinction, exclusion ou restriction due au handicap, y compris le refus d’aménagement raisonnable». Ladite loi vise également à garantir la protection des personnes handicapées contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, toutes les formes d’exploitation, la violence et les insultes, ainsi que la protection de leur vie privée.
Race, origine nationale et origine sociale
États-Unis (Californie): en 2018, le Code réglementaire de Californie (art. 11027 et 11028) a été modifié afin d’élargir la définition de l’origine nationale et d’étendre la protection contre la discrimination à de nouvelles catégories d’individus. En particulier, sauf si un employeur peut apporter la preuve d’une nécessité pour l’entreprise, les restrictions concernant l’emploi d’une langue en particulier sont présumées illégales. En outre, un employeur ne peut discriminer une personne sur la base de son niveau d’anglais ou de son accent en anglais, sauf si ces éléments constituent un obstacle à la bonne exécution des tâches professionnelles. Enfin, toute discrimination à l’égard de salariés fondée sur leur statut migratoire est interdite, sauf si l’employeur apporte la preuve «claire et convaincante» que ses agissements étaient nécessaires pour respecter les lois fédérales relatives à l’immigration.
Hong-kong (Chine): l’ordonnance relative à la discrimination raciale de 2020 définit le harcèlement racial comme, premièrement, la «conduite qui n’est pas bienvenue» motivée par la race «dans des circonstances dans lesquelles une personne raisonnable, compte tenu de toutes les circonstances, aurait estimé que l’autre personne serait offensée, humiliée ou intimidée par cette conduite»; deuxièmement, la création d’un environnement hostile ou intimidant. Cette ordonnance suit le lancement, en 2018, de la Charte pour la diversité raciale et l’inclusion des salariés de la Commission pour l’égalité de chances, qui contient une liste de vérification des mesures et des pratiques que les employeurs doivent respecter (Hong-kong (Chine) 2018) 18
Orientation sexuelle et identité de genre
Brésil: en 2020, le Comité pour la promotion de l’égalité de chances et l’élimination de la discrimination au travail du bureau du ministère public chargé du travail a publié la note technique n° 02/2020 pour aider ce service à défendre les droits des LGBTQI+ dans le contexte du travail. D’après cette note technique, les employeurs (sociétés, organismes publics, individus et syndicats professionnels, de tous les secteurs économiques et entités à but non lucratif) sont tenus d’adopter des mesures pour empêcher que les salariés, salariés extérieurs, stagiaires ou clients LGBTQI+ ne soient directement ou indirectement exposés à la violence et au harcèlement qui s’enracinent dans la phobie des LGBTQI ou la transphobie ou au harcèlement sexuel et au cyberharcèlement fondés sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre.
Canada: en juin 2017, le gouvernement canadien a modifié la loi sur les droits de la personne afin de prohiber la discrimination dans l’emploi, dont le harcèlement résultant de la discrimination fondée sur l’identité et l’expression de genre.
Japon: les orientations sur la loi relative au harcèlement au travail disposent que l’«outing» d’une personne LGBTQI+ ou l’insulte visant la sexualité ou l’identité de genre d’une personne constituent un harcèlement hiérarchique et sont interdits (Bibliothèque du Congrès 2020).
États-Unis: le 15 juin 2020, dans Bostock v. Clayton County, la Cour suprême des États-Unis a statué que la loi de 1964 sur les droits civils protège les salariés contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre.
VIH et sida
Inde: la loide2017surlapréventionduVIHetlaluttecontreleVIHdispose ce quisuit: Nul ne doit, par des mots, prononcés ou écrits, publier, diffuser, défendre ou communiquer, par des signes ou par une représentation visible ou d’une autre manière, les sentiments de haine à l’égard de toutes personnes protégées ou de tout groupe protégé de manière générale ou particulière, ni diffuser, retransmettre ou émettre toute information, publicité ou avis qui peut être raisonnablement considéré comme attestant d’une intention de propager la haine ou qui est susceptible d’exposer des personnes protégées à la haine, à la discrimination ou à la violence physique (chap. 1).
Nicaragua: l’article 8 d)de la loi n° 779 de 2012 sur la violence à l’égard des femmes interdit toutes les formes de violence qui «discriminent les femmes dans les lieux de travail publics ou privés et qui font obstacle à leur accès à l’emploi, au recrutement, à un salaire décent et équitable, à une promotion, à leur stabilité ou à leur maintien dans leur emploi, en imposant des conditions concernant la situation matrimoniale, la maternité, la stérilisation chirurgicale, l’âge, l’apparence physique, le test de grossesse, le test du VIH/sida ou tout autre test sur l’état de santé des femmes».
Miscellanées
Albanie: l’article 9(2), tel que modifié, du Code du travail interdit la discrimination dans l’emploi et la profession en ajoutant les motifs suivants: handicap, VIH/sida ou affiliation syndicale (loi n° 136/2015).
France: au fil des ans, y compris récemment, la liste des motifs de discrimination prohibés contenus dans l’article L1132-1 du Code du travail a été élargie. Elle couvre désormais: l’origine, le sexe, les mœurs, l’orientation sexuelle, l’identité de genre, l’âge, la situation de famille, la grossesse, les caractéristiques génétiques, la particulière vulnérabilité résultant de la situation économique, l’appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, les opinions politiques, les activités syndicales, l’exercice d’un mandat électif, les convictions religieuses, l’apparence physique, le nom de famille, le lieu de résidence, le lieu de la domiciliation bancaire, l’état de santé, la perte d’autonomie, le handicap, et la capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français.
Libéria: la loi de 2015 sur le travail décent interdit la discrimination directe et indirecte à l’égard de toutes les personnes qui travaillent ou cherchent à travailler fondée sur les motifs protégés par l’article 1(1) a) de la convention n° 111 de l’OIT, ainsi que sur un ensemble de motifs supplémentaires, dont la tribu, le groupe autochtone,lasituationéconomique,lacommunauté,lestatutd’immigrantou de résident temporaire, l’âge, le handicap physique ou mental, l’orientation de genre, la situation matrimoniale ou les responsabilités familiales, la grossesse et l’état de santé, y compris le statut VIH ou sida (art. 2.4 et 2.7) (OIT CEACR 2016).
Le Mexique a publié le décret exécutif appelé loi Olimpia, ou loi sur la violence numérique, qui porte modification du Code pénal pour Mexico et de la loi sur l’accès des femmes à une vie exempte de violence à Mexico. Les modifications apportées aux articles 209 et 236 du Code pénal de Mexico prévoient un alourdissement des peines si la violence numérique est exercée à l’égard de citoyens âgés, de personnes handicapées, de sans-abri ou de personnes autochtones, ou si des médias numériques ou électroniques ou tout autre dispositif de communication sont utilisés comme moyen de commission de l’infraction, ainsi que dans les cas où l’infraction utilise des images, des audios ou des vidéos renfermant un contenu sexuel intime (Mexique, sans date).
États-Unis (État de New York): en 2019, l’État de New York a étendu ses protections contre le harcèlement à toute catégorie protégée: âge, race, croyance, couleur, origine nationale, sexe, orientation sexuelle, identité ou expression de genre, statut militaire, handicap, caractéristiques génétiques entraînant une prédisposition, situation familiale, situation matrimoniale, source de revenu légale, arrestation et condamnation, santé sexuelle et génésique, et statut de victime de violence domestique (Zweig 2020).
Sao Tomé-et-Principe: la loi n° 6/2019 du 16 novembre 2018 définit et interdit la discrimination directe et indirecte fondée sur les motifs suivants: ascendance et origine sociale, race, couleur, âge, sexe, orientation sexuelle, situation matrimoniale, situation familiale, patrimoine génétique, capacité de travail réduite, handicap ou maladie chronique, nationalité, origine ethnique, religion, croyances politiques ou idéologiques et affiliation syndicale (art. 15 à 17).
S’agissant de la détermination des groupes vulnérables et des groupes en situation de vulnérabilité, le paragraphe 13 de la recommandation n° 206 précise que celle-ci devrait se faire conformément aux normes internationales du travail et aux instruments internationaux relatifs aux droits humains applicables. Le seul groupe dans une situation vulnérable que la recommandation n° 206 mentionne expressément est le suivant: «les travailleurs migrants, en particulier les travailleuses migrantes, quel que soit leur statut migratoire» (paragr. 10). Les travailleurs migrants, en particulier ceux qui sont en situation irrégulière, sont vulnérables à la violence et au harcèlement dans le monde du travail à tous les stades du cycle migratoire (BIT 2016c; 2017; OMS 2020) 19. Le fait que, dans de nombreux cas, les travailleurs migrants temporaires ou les migrants en situation irrégulière ne jouissent pas, en droit ou dans la pratique, de l’égalité de traitement avec les travailleurs nationaux, ou peuvent être exclus du champ d’application des dispositions individuelles et collectives relatives à l’emploi, aggrave cette situation et crée un niveau de menace plus élevé (OIT 2020f). Cette menace de violence et de harcèlement est encore plus présente pour les travailleuses migrantes dans ces situations.
Pour cette raison, le paragraphe 10 de la recommandation n° 206 invite les États Membres à «prendre des mesures législatives ou autres pour protéger contre la violence et le harcèlement dans le monde du travail les travailleurs migrants, en particulier les travailleuses migrantes, quel que soit leur statut migratoire, dans les pays d’origine, de transit ou de destination selon qu’il convient». Outre le fait qu’ils garantissent que les dispositions individuelles et collectives relatives à l’emploi et les dispositions relatives au droit du travail couvrent également les travailleurs migrants, lorsqu’ils sont rédigés dans le respect des normes internationales du travail, les mémorandums d’accord et les accords bilatéraux peuvent contribuer à garantir la protection nécessaire pour toutes les personnes concernées.
Encadré 11. Violence et harcèlement et protection des travailleurs migrants
De récents accords bilatéraux relatifs au travail contiennent des dispositions affirmant que les travailleurs migrants devaient être traités dans le respect des lois de l’État d’accueil ou énonçant leurs droits humains en tant que travailleurs migrants (BIT 2017). Le nouvel accord entre les États-Unis d’Amérique, les États-Unis du Mexique et le Canada (qui a succédé à l’Accord de libre-échange nord-américain), récemment signé, mentionne expressément la nécessité de garantir les droits au travail aux travailleurs migrants, y compris tous les principes et droits fondamentaux au travail (art. 23.3 et 23.9), et de combattre tous cas de «violence, menaces et intimidation à l’égard des travailleurs» (art. 23.7). L’accord général entre le Népal et la Jordanie de 2017 1 contient également une disposition expresse sur la nécessité de garantir le droit à l’égalité et à la non-discrimination aux travailleurs migrants (Wickramasekara 2018).
1 Le nom complet de cet accord est Accord général dans le domaine de la main-d’œuvre entre le gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie et le gouvernement du Népal.
15 Même si les instruments de l’OIT relatifs à la liberté syndicale ne contiennent pas d’interdiction expresse de la violence contre les activités syndicales, la CEACR n’a de cesse de relever l’interdépendance entre les libertés publiques et les droits syndicaux, et en particulier l’importance, pour les syndicats, d’opérer dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de quelque nature que ce soit (voir BIT 2012).
16 Ladite étude est consacrée aux États-Unis et montre que ce recul bénéficie de manière disproportionnée aux femmes blanches, qui sont désormais beaucoup moins susceptibles de subir du harcèlement sexuel que, par exemple, les Américaines d’ascendance africaine.
17 Les politiques sociales qui allègent la charge du travail d’aide à la personne non rémunéré et qui favorisent un partage des responsabilités familiales de manière plus égale sont aussi essentielles, car elles combattent la discrimination sur le lieu de travail et permettent aux travailleurs, en particulier aux femmes, de combiner le travail familial et le travail rémunéré. Voir OIT 2018c; OIT 2019f.
18 Couvrant les domaines de l’environnement politique, culturel et professionnel, la Charte consiste en une liste de neuf lignes directrices: i) la mise en œuvre de politiques relatives à l’égalité raciale et à la diversité pour l’organisation; ii) la mise en place de procédures et de critères équitables en matière de recrutement, de nomination, de promotion, de formation du personnel et de licenciement; iii) l’examen régulier des processus et politiques d’emploi afin de faire tomber les obstacles pour les personnes de toutes les races; iv) la sensibilisation aux politiques et principes de l’inclusion raciale parmi le personnel; v) le fait d’encourager, de sa propre initiative, la collaboration avec les minorités raciales des communautés défavorisées et sous- représentées; vi) la création d’un environnement de travail sûr et collaboratif pour tous les salariés; vii) le fait de faire sentir aux salariés de toutes les races qu’ils sont impliqués et inclus; viii) la mise en place d’une procédure de plainte formelle pour les salariés afin que ceux-ci puissent dénoncer toute discrimination et bénéficier de réparation; ix) la garantie que les plaintes soient traitées rapidement, efficacement et confidentiellement (Hong-kong (Chine) 2018).
19 À ce propos, le Comité des Nations Unies pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (CMW) et le Rapporteur spécial sur les droits humains des migrants ont estimé que l’entrée illégale ou le séjour clandestin ne devaient pas être considérés comme des infractions pénales et que les migrants en situation irrégulière n’étaient pas des criminels par nature et qu’ils ne devaient pas être traités comme tels. Le CMW a également estimé qu’une telle incrimination alimente, parmi la population, l’idée que les travailleurs migrants et les membres de leur famille en situation irrégulière sont «illégaux» ou représentent une concurrence déloyale pour les emplois et les prestations sociales, entretenant par là la discrimination et la xénophobie. Faisant fond sur cela, et compte tenu du fait qu’une telle incrimination expose davantage les travailleurs migrants au risque de violation de leurs droits humains fondamentaux, la CEACR a souligné qu’il était particulièrement important de prendre des mesures destinées à lutter contre les stéréotypes et les préjugés selon lesquels les migrants seraient plus enclins à la délinquance et à la violence, ainsi qu’à protéger tous les travailleurs migrants contre la discrimination raciale et la xénophobie (BIT 2016c, paragr. 294).