La convention n° 190 et la recommandation n° 206 répondent à la réalité qui veut qu’il n’est pas nécessaire que les actes de violence et de harcèlement s’exercent exclusivement sur un lieu de travail physique traditionnel pour qu’ils soient compris comme étant des comportements liés au travail interdits. Le travail étant exécuté dans plusieurs contextes et selon des modalités différentes, y compris par l’intermédiaire des technologies, ces instruments visent à garantir la protection en tous lieux ou toutes circonstances liés au travail.
Article 3
La présente convention s’applique à la violence et au harcèlement dans le monde du travail s’exerçant à l’occasion, en lien avec ou du fait du travail:
- sur le lieu de travail, y compris les espaces publics et les espaces privés lorsqu’ils servent de lieu de travail;
- sur les lieux où le travailleur est payé, prend ses pauses ou ses repas ou utilise des installations sanitaires, des salles d’eau ou des vestiaires;
- à l’occasion de déplacements, de voyages, de formations, d’événements ou d’activités sociales liés au travail;
- dans le cadre de communications liées au travail, y compris celles effectuées au moyen de technologies de l’information et de la communication;
- dans le logement fourni par l’employeur;
- pendant les trajets entre le domicile et le lieu de travail.
En s’appliquant à la violence et au harcèlement «s’exerçant à l’occasion, en lien avec ou du fait du travail», la convention n° 190 saisit la nature évolutive du travail, y compris les nouveaux types et les différentes modalités de travail (OIT 2018b, en particulier les paragraphes 180 à 184). La mention des «espaces publics et [d]es espaces privés lorsqu’ils servent de lieu de travail» à l’article 3 vise à couvrir la situation des personnes dans l’économie informelle, par exemple les vendeurs ambulants; les travailleurs domestiques, qui travaillent dans ou pour un ménage ou des ménages privé(s); ou les travailleurs à domicile, qui travaillent depuis chez eux (OIT 2018a; BIT 2016b). Avec la mention expresse des «communications liées au travail, y compris celles effectuées au moyen de technologies de l’information et de la communication», tous les types de communication, y compris les courriels et les médias sociaux, sont couverts (De Stefano et al. 2020). Cela est particulièrement important à la lumière des modalités de télétravail qui se multiplient ces dernières années, notamment en tant que moyen d’apporter une plus grande flexibilité pour assumer les responsabilités professionnelles et familiales.
D’autres normes de l’OIT – en particulier celles liées à la SST – contiennent également une notion du «lieu de travail» plus large que celle du lieu de travail physique traditionnel. Aux termes de la convention (n° 155) de l’OIT sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, l’expression «lieu de travail» vise tous les endroits où les travailleurs doivent se trouver ou se rendre du fait de leur travail et qui sont placés sous le contrôle direct ou indirect de l’employeur (art. 3 c)). Le protocole de 2002 relatif à la convention sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, prévoit la publication d’informations sur les mesures prises concernant les accidents du travail, les cas de maladies professionnelles et les autres atteintes à la santé survenant «au cours du travail ou ayant un rapport avec celui-ci» (préambule e)). Dans la partie du protocole consacrée aux définitions, l’expression «événement dangereux» vise tout événement facilement identifiable selon la définition qu’en donne la législation nationale, qui pourrait être cause de lésions corporelles ou d’atteintes à la santé chez les personnes au travail ou dans le public (art. 1 c)).
L’expression «accident de trajet» vise tout accident ayant entraîné la mort ou des lésions corporelles survenu sur le trajet direct entre le lieu de travail et: i) le lieu de résidence principale ou secondaire du travailleur; ou ii) le lieu où le travailleur prend habituellement ses repas; ou iii) le lieu où le travailleur reçoit habituellement son salaire (art. 1 d)). La recommandation (n° 164) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, dispose également que les employeurs devraient être tenus d’enregistrer les données relatives à la SST et au milieu de travail, y compris les données concernant tous les accidents du travail et tous les cas d’atteintes à la santé survenant «au cours du travail ou ayant un rapport avec celui-ci» et donnant lieu à déclaration (paragr. 15(2)) (OIT 2020c).
Encadré 7. Protection contre la violence et le harcèlement au-delà du lieu de travail physique traditionnel: exemples des législations récentes
Des réformes législatives récentes ont commencé à énoncer des lieuxou cas différents dans lesquels la violence et le harcèlement dans le monde du travail peuvent s’exercer au-delà du lieu de travail physique traditionnel. Entre autres phénomènes, la violence et le harcèlement en ligne bénéficient d’une attention accrue en tant que notion isolée ou autonome, ou en tant que moyen servant à perpétrer violence et harcèlement.